lundi 26 janvier 2009

Elle - Prologue


Un jour, je m'assoie et je regarde ma vie. Je pleure, je ris, l'air maussade, triste, rêveur.

Un jour, je prends une feuille et je commence une histoire. Je crée des personnages, un homme, des femmes, différentes, sensibles à cet homme. Amoureuses, torturées, heureuses, déchirées. Des femmes. Un homme.

Un jour, j'écoute une musique avec un goût de renfermé. Des souvenirs s'entrechoquent et les notes dégagent une odeur de bien être. L'estomac se noue, la gorge se serre. Un sourire béat s'installe laissant couler une larme ridicule sur une joue aride. Les mains se dispersent. Les yeux se referment pour ne pas laisser s'échapper cet instant presque unique. La musique enivre l'instant, le souvenir s'étend, se propage, déteint sur d'autres images enfouies, oubliées depuis si longtemps, s'envole en ouvrant toutes les portes sur son passage, et disparaît.

Un jour, vous ouvrez les yeux.

Je regarde ma vie et je décide de l'observer. De façon objective, réaliste et sans censure. Une version que je garderais pour moi. Rien que pour moi. Et peut-être un peu pour les autres…

Je m'éloigne du bord et je regarde au loin ce moi infini. Loin. Très loin. Ma vie. Elle me parait si grande que j'aurais du mal à la visualiser d'un seul regard. Mais elle est si réduite, que j'ai l'impression qu'elle a été remplie de vide, à mon insu.

*


Je crois être.

Un schizophrène passif, latent, endormi, qui attend tranquillement que son heure arrive. J'ai en moi plusieurs vies imaginaires qui se disputent un morceau de réel, plusieurs destins qui se croisent et qui inventent à leur tour d'autres vies imaginaires, des démons qui me hantent et qui croupissent auprès de moi. Des vies éteintes qui activent ma mémoire. Des corps putréfiés qui se nourrissent de mes souvenirs. Et au final, c'est ma vie que je réécris.

Je suis passif. Je laisse passer le temps. Evoluer les choses. S'écrouler les mondes autour de moi et je ne fais jamais rien. J'attends. Une fois le désastre accompli, je réécris. Je repose les pierres une par une, là où elles étaient. Parfois je rajoute ça et là. Et j'attends.


On peut y voir un simple désir de destruction. Moi, je n'y vois rien d'autre que de la créativité maladive. De l'art sentimental. De la torture psychologique chronique basée sur des émotions fortes, poussées à l'extrême en vue de faire naître quelque chose de concret. L'existence, la naissance, la renaissance, l'amour, la déchéance de l'être, les envies, les regrets, les déceptions, les joies, la peur, la mort, la vie. Un remède à l'ennui. Un vaccin contre les habitudes. Contre la lassitude et le dégoût. De la peur et du plaisir.

Un monde que je crée. Des moments que je revis dans mon esprit, que je matérialise et que je garde pour moi.

*


(à suivre...)

2 commentaires:

  1. Bravo pour ton travail. On voit le pro. Tu peux faire des series et vas y avoir des fans ! Pleins de becs. Tibo.

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  2. Ta place d'expo a la biblio est toujours valable, ton travail plait :)

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